Moi les trucs pas possible ça me rend grincheux. Alors :
Mettons monsieur Dupont. Il a fini par perdre son permis B à force de vivre en France. En attendant de le récupérer, il se retrouve, un peu obligé, à devoir s’acheter un deux roues. Mais monsieur Dupont à la quarantaine, les scooters d’ado, c’est plus son truc. « J’ai plus l’âge » soupire-t-il à sa femme, fâchée toute rouge qu’il ait perdu son permis. « Ça va nous coûter combien, encore, cette histoire ? Et l’essence ? Et les réparations ? »
Bien obligé, monsieur Dupont fait des recherches. Il découvre l’existence des deux roues électriques. Sa femme se voit rassurée par le fait qu’il n’y aura ni essence à payer, ni entretien coûteux. Parce que voyez-vous, le couple Dupont n’a qu’une voiture. Monsieur et madame Dupont prennent leur voiture le matin, emmènent leurs deux enfants à l’école, puis monsieur dépose madame à son bureau, puis parcoure encore 7 kilomètres de bouchon pour atteindre le sien.
Avec cette idée saugrenue de scooter, pendant que monsieur Dupont chevauche son engin d’ado, madame Dupont devra conduire les enfants à l’école et aller jusqu’à son travail… Alors qu’elle n’aime pas conduire. Elle aimait bien que son monsieur Dupont conduise. Même si elle ne lui avait jamais dit, un peu honteuse.
Dupont : « T’auras qu’à prendre le métro ! » qu’elle lui dit, soucieuse des finances du couple.
Dupont : « Faut pas y compter » marmonne-t-il tout bas pour ne pas qu’elle l’entende.
Un matin d’orage, Monsieur Dupont craque et achète un N-PRO. Petit apport, gros crédit. « Ma femme comprendra… » Méthode Coué, monsieur Dupont.
Comme un gosse, il virevolte entre les voitures sans un bruit ni un problème pendant plusieurs mois. Au début, sa femme n’est pas contente : « T’as pris un crédit sans m’en parler ! »
Puis, avec le temps, madame Dupont finit par accepter le nouveau venu. La voiture du couple devient peu à peu la voiture de madame. Elle écoute sa musique, met un truc qui sent bon sur les aérations et une petite peluche au rétro central. Les Dupont ne peuvent pas se passer d’être un peu cliché.
Voilà qu’arrive l’été. Avec sa femme, les enfants sont grands et restent à la maison, ils vont faire des tours, madame monte derrière. Elle a fait installer le dosseret passager officiel Niu, son dos en est heureux. « C’était un peu cher, mais bon », dit-elle à ses copines qui la comprennent pas vraiment. « Quand même… tu pourrais tomber ! »
Soleil. Chaleur. Balade. Madame commence à trouver que finalement, c’est peut-être une bonne chose que son imbécile de Jules ait perdu son permis. Surtout, surtout, ne rien lui dire.
Début août, monsieur Dupont finit enfin par récupérer son permis. Ceci annonce le retour des bouchons et de la liberté perdue. Il déprime un peu, mais il doit se montrer responsable. C’est mieux pour les enfants… C’est mieux pour madame.
« C’est bizarre », se dit il entre deux camions qui puent. « Elle ne m’en parle plus tellement, de mon permis. De comment c’était pratique… De comment (il accélère, c’est vert) c’était indispensable pour elle d’être amené à son travail en voiture ». Les choses changent monsieur Dupont.
Monsieur Dupont était satisfait de l’autonomie de son scooter « Je pensais pas que ça serait comme sur la pub.. Enfin, oui, presque comme sur la pub ». Et puis, pas de bruit… « Et que d’économie ! » Comme un seul homme, Dupont se lève de son canapé : « Ce n’est pas grave ! », se dit-il alors. « Je vais repasser la formation de 7 heures, et hop ! »
Quinze jours passent. On laisse les enfants à la maison et on monte sur le Niu voir mamie pour le 14 juillet. On va au cinéma, au resto. On a même pas froid.
Content de lui, monsieur Dupont réussit sa formation et se dirige vers la concession où il avait acheté son N-PRO. Il dit alors au vendeur : « Vous m’aviez dit mon N-PRO était exactement le même que le N-GT, seule la vitesse max changeait. J’ai récupéré mes points, j’ai fait la formation. Bon, on le débride ? » Dis monsieur Dupont, pétouillant d’autosatisfaction.
Le vendeur : « Ce n’est pas possible ».
Dupont : « Pourquoi ? »
Le vendeur : « Parce que ».
Dupont, déçu, rentre chez lui à 45 km/h. Une petite descente, 47. Sa femme l’attend sur le canapé, les gosses sont devant la télé.
Dupont : « Alors ? »
Dupont : « Ils ne peuvent pas le faire… Ou ils ne veulent pas. Je ne sais pas… C’est complètement con ce truc. J’ai un scooter identique au modèle 125, j’ai le droit de rouler sur un 125 et une bricole va m’obliger à revendre celui-là pour acheter exactement le même ».
Dupont : « Ça fait cher la bricole ! »
Dupont : « Et on nous parle d’écologie… Quand on sait combien ça coûte à la planète de produire des batteries lithium ».
Dupont : « Et elle est encore bonne, ta batterie ? »
Dupont : « Il y en a deux chérie, c’est pour cela qu’on a pu aller voir ta mère pour le 14 juillet », dit-il, un peu agacé par ce déjeuner où la télé, volume à fond, diffusait la fin du défilé.
Dupont : « Alors, tu vas faire quoi ? » soupire-t-elle, dans l’attente d’une solution comme tombée du ciel alors qu’il y a six mois, elle ne voulait pas voir de scooter.
Dupont : « J’ai vu qu’une autre marque faisait une moto électrique un peu vintage. C’est une 125. Elle a du style ».
Dupont : « Fais voir sur ton tel… Et il faudrait que tu revendes le scooter… On va perdre de l’argent… »
Dupont : « Pas mal oui. Attends » Dupont cherche sur son téléphone.
Dupont : « Ha oui elle est jolie… »
Dupont : « Et puis j’ai trouvé un super forum qui en parle, plein de gars l’ont. Il y en a un qui est grincheux et un autre qui se prend pour un personnage de série télé, mais les autres sont sympa. Ça pourrait être cool »
Dupont, regardant le téléphone de Dupont : « On peut monter à deux qu’ils disent… Mais la selle est plus petite que sur notre scooter… »
Dupont, notant le notre, pensant très fort « elle m’a déjà piqué ma bagnole », répond à Dupont : « Tu n’auras qu’à te serrer un peu ».
, le il y a 4 années et 6 mois.
